• "Mais, quand d’un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des autres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l’odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l’édifice immense du souvenir." Marcel Proust

    De ces senteurs qui vous ramènent instantanément ailleurs et autrefois, comme une porte temporelle qui s'ouvrirait d'elle-même, je sais que j'en possède quelques-unes enfouies au plus profond de ma mémoire et finalement de moi-même...

    La plus ancienne est certainement celle de la cire qu'on appliquait autrefois en fin d'année scolaire sur son pupitre et qui surtout symbolisait le passage d'une année à l'autre du départ en vacances de juin à la rentrée de septembre quand les classes sentaient le propre! Cette odeur, si je me concentre, je peux presque la sentir encore....

    La plus importante, c'est un mélange complexe de soleil, de sècheresse et surtout d'interdit qui ont conféré aux ajoncs et aux genets de Saint Quay Portrieux, un parfum particulier impossible à retrouver mais que je peux frôler souvent quand certaines circonstances climatiques, par ailleurs pas si fréquentes en Bretagne du nord, sont réunies.

    Pourquoi l'interdit? C'est simple pour descendre du terrain de camping où mes parents nous installaient pour un mois à la plage de Saint Quay, il y a deux voies possibles. Une route qui serpente à travers des propriétés, en location la plupart du temps l'été, et le chemin de ronde. Le chemin de ronde ou des douaniers, selon les sources, est un petit sentier qui longe exactement le bord de la falaise. Un plaisir inégalable pour de jeunes garçons, mais un danger trop fort pour les parents, donc nous n'avions pas le droit de nous y risquer sans eux.

    Mais voilà, mes parents nous déposaient sur la plage, allaient faire des courses, nous rejoignaient pour un bain en famille et puis repartaient assez vite pour préparer le repas. Nous les enfants, avions le droit de rester derrière eux et de les rejoindre à l'heure du repas. Bien entendu, souvent, en tout cas dès que le temps le permettait, nous avons violé cet interdit. Et je ressens encore l'émotion de ces odeurs croisées, du bruit des cosses d'ajoncs qui éclatent sous le soleil, un bruit très semblable à celui que font les braises d'un feu, la fatigue du sentier, la chaleur, le plaisir de la liberté, le plaisir de l'interdit surpassé!

    Des odeurs clés, j'en ai probablement d'autres enfouies dans ma mémoire, comme j'ai des chansons, j'y reviendrai!

    Mais je profite de ce texte pour vous lancer un défi, racontez-moi vous aussi vos "madeleines"! 


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  • Nelson Mandela vient de s'éteindre. Cet homme avait une stature telle qu'on peut penser qu'avec lui a disparu le dernier des grands hommes de notre temps.

    Terroriste (selon la vision du pouvoir) à ses débuts, emprisonné dans des conditions inhumaines pendant de longues années (plus que certains condamnés à la perpétuité), il a su démontrer ensuite des qualités de leader et d'home d'état. En renonçant à la violence, outre qu'il ait atteint avec la fin de l'apartheid, son principal objectif, il obtint une reconnaissance internationale à tel point qu'il fut appelé à jouer à de nombreuses reprises, un rôle de médiateur pour éviter ou mettre un terme à plusieurs conflits africains. 

    M. Mandela rejoint ainsi Ghandi et Luther King. Il aura eu le privilège (payé au prix fort) de voir le résultat (certes encore imparfait) de ses efforts et de ne pas finir sous les balles d'un illuminé ou d'un assassin.

    Aujourd'hui, aucune personnalité ne se profile avec un tel potentiel. Il y a bien sûr des leaders en lutte contre les inégalités, contre les injustices, il y a des journalistes ou (trop rarement) des politiciens qui dénoncent et s'opposent à des pouvoirs trop brutaux ou antidémocratiques. Mais personne ne démontre agir selon le principe, qu'avait compris M. Mandela, que le véritable combat politique doit dépasser une lutte qui ne viserait que le renversement des pouvoirs injustes, pour établir les conditions d'une réconciliation pacifique et équitable et non pas revancharde.

    C'est impressionnat de réaliser qu'après une vingtaine d'années de captivité, ce n'est pas la haine et la vengeance qui animent le héros libéré mais la gestion du lendemain, dans l'intérêt de son peuple!

    M. Mandela mérite le respect de tous!


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  • En France, la santé des Présidents est régulièrement un des thèmes phares de l'actualité médiatique. Et c'est évidemment la stratégie du secret ou de la désinformation qui suscite l'intérêt, bien davantage que le fait en lui même, d'une éventuelle maladie ou intervention chirurgicale.

    On dit souvent que le Président, modèle Vème République, est pratiquement un monarque. Le protocole, plus la personnalité de certains et de presque tous une fois investis, ont construit autour de l'homme un carcan d'apparât et de formalisme qui probablement contribue au prestige de la charge mais qui, en revanche, ôte toute humanité et proximité à une fonction certes importante mais finalement une fonction de représentation des citoyens.

    Le Président devient ainsi une Institution, un quasi dieu vivant, je ne parle évidemment pas ici en termes de perception par les électeurs qui peut-être très différente ;-).

    J'exagère? Je ne pense vraiment pas et je déplore d'ailleurs cette acceptation par des Présidents dits proches de la France d'en bas....

    Dans ces circonstances, il devient évident et naturel que la santé soit "officielle" avant d'être "réelle". Ce "paramètre" étant géré comme un outil de communication ultra sensible et donc ultra stratégique.

    Et ce n'est pas propre à la France ni à notre époque. Sans remonter très loin, on se rappelle de ces "premiers secrétaires" soviétiques que la médecine russe s'ingéniait à maintenir debout le plus longtemps possible, pour que leur poste reste occupé jusqu'à ce que le "centralisme démocratique" ait désigné leur successeur.

    Et, si on quitte un instant la santé au strict sens médical, cette différence voulue entre le réel et le paraître est en fait éternelle. J'en veux pour preuve, par exemple, qu'une des ruptures qu'a tenté d'instaurer le pharaon Akhenaton, considéré comme hérétique, ait été justement de se faire représenter comme il était, ventru et pas très beau, au lieu de ces images de guerriers puissants, aux regards impénétrables fixés sur la cime des pyramides (les Vosges étant trop loin quand même).

    Bien entendu, il ne serait pas souhaitable non plus de tomber dans l'excès inverse et d'instrumentaliser un élément éminnement privé en communiquant sur tout et sur rien.

    Mais, tout en souhaitant à Monsieur Hollande de se porter le mieux possible, je considère personellement que cette démarche de secret est ridicule. Le Président est un homme et comme chacun d'entre nous il doit subir parfois un mal de tête, de ventre ou un rhume et comme certains d'entre nous peut-être aura t-il à affronter un problème plus sérieux. Il aurait beaucoup à gagner à se démontrer tel et non pas à s'ériger en monstre froid, différent, lointain.

    Voici une rupture facile à provoquer, mas qui manquera probablement à la fin du septennat.

    En tout cas moi, Président de la République, je ne maintiendrais pas le secret sur ma santé lorsqu'elle peut influer sur ma capacité à gouverner....


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  • On a souvent tendance à lire que les extrêmes (droite et gauche) enregistrent des votes de protestation. Du coup certains n'hésitent pas à les mettre dans le même sac, ce qui ne correspond absolument pas, ni à leur héritage historique respectif, ni au fond de leurs positions, au delà des critiques au pouvoir en place!

    D'une manière simplifiée, on peut dire que l'extrême gauche est l'héritière du mouvement internationaliste trotskyste alors que l'extrême droite est dépositaire d'une idéologie nostalgique d'une part des mouvements fascistes, qui ont conduit à la deuxième guerre mondiale, et de leurs composantes xénophobes, antisémites et d'autre part, de l'idée d'une prétendue supériorité de la civilisation blanche occidentale, sans oublier les revanchards de la guerre d'Algérie, voire de Pétain.

    Bref, d'un côté des gens qui ont une vision internationaliste du monde, de l'autre une vision frileuse, rétrograde et archaïque. 

    Pour ne pas être (trop) taxé de manque d'objectivité, je dirais que trop souvent le vote pour l'extrême gauche est "gâché" par l'isolement et l'éparpillement des différents mouvements qui la composent. Mais au moins, au niveau des militants, il existe une vraie générosité, une vraie proximité du monde ouvrier et des chômeurs, une vrai camaraderie au sens magnifique du mot!

    A l'extrême droite en revanche, tout sent l'ordre et la force. A discours haineux, postillonnant et finalement grotesque de son père, l'héritière (tiens, une dynastie à la tête d'un parti soi-disant démocratique?) est beaucoup plus habile, je dirais calculatrice. Discours policé (mais le naturel n'est jamais loin), rajeunissement et féminisation des leaders (une femme fasciste semble moins effrayant qu'un homme), discours apparemment plus modéré, bref toute la panoplie du chef lancé à la conquête du pouvoir.

    C'est vrai pourquoi la France échapperait-elle à cette poussée de fièvre que connaissent trop d'autres pays européens où s'affirmer raciste, nationaliste, anti-européen, bref le discours "progressiste" par excellence (je plaisante pour ceux qui risquent de prendre le 1er degré), est primé par l'électeur?

    Peut-être parce que la France a payé le prix fort à cette idéologie, peut-être parce que malgré tout la patrie de Voltaire ne peut pas s'abandonner à une telle bassesse?

    Ou plus simplement parce que pour la grande majorité des électeurs, ce vote est une impasse complète. Si on parle de "préférence nationale" déjà obligatoirement "préférence communautaire" pour cause d'Union européenne, ne tient pas la route une seconde au  niveau des droits de l'homme. L'immigration zéro? c'est déjà comme ça et si personne ne parle plus des charters, cette politique dégueulasse cause des drames humains en permanence en toute discrétion. Côté social? qui peut penser un seul instant que les pauvres et les faibles ont à gagner avec une extrême droite ultralibérale et violemment anti-syndicale. C'est d'ailleurs toujours comme ça. Les classes moyennes soutiennent un pouvoir fort "seul capable de remettre de l'ordre" et après cela, finies les libertés, vive la censure, la Presse muselée, l'arbitraire, les gros bras et la violence.

    Rien de ça n'arrivera en France? pourquoi ne pas essayer? Parce que l'Histoire nous a déjà passé le film. Parce que même lorsqu'on pense que les garde-fous sont puissants et protecteurs, tout démontre que les Lois se changent vite, qu'une majorité déterminée peut embarquer un pays dans le chaos et qu'alors, il est trop tard pour réagir et pour regretter.

    La haine, l'exclusion, la xénophobie et d'une manière générale, les solutions simplistes ne sont pas des éléments porteurs d'avenir, à moins de le vouloir couvert de nuages noirs (bruns) pour nous et nos enfants.


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  • Enfin!

    Hier à Rome à 17h42 exactement, le Sénat romain (pas le SPQR, mais sa pâle copie actuelle) a finalement voté l'exclusion de Berlusconi, plus de 3 mois après sa condamnation définitive pour fraude fiscale.

    Oh certes, cela ne change rien sur le fonds et le milliardaire italien continuera à entrainer derrière lui des millions de citoyens qui ne parviennent pas à boucler le mois, mais qui voient en lui, le sauveur de l'Italie et le défenseur des faibles!

    Pourtant en Démocratie, ou ce qu'il en reste, les symboles jouent parfois un rôle important. On a vu l'effet de l'annonce de la taxation à 75% en France, même si là, le symbole risque de se retourner contre ceux qui n'oseraient plus mettre en œuvre la promesse faite.

    En Italie, d'abord voir un procès de Berlusconi qui parvient à aller jusqu'à sa conclusion est déjà en soi un fait à souligner. Entre les Lois sur mesure (dépénalisations, prescription, empêchement légitime, etc.), les procédures usées et abusées par des batteries d'avocats et les complexités des circuits financiers en jeu, bravo à ceux qui ont su maintenir le cap et arriver à bon port. Le symbole est donc: même en Italie, la Loi peut être appliquée!

    Ensuite, l'exclusion du Sénat affaiblit Berlusconi, là aussi symboliquement mais cependant pas sans conséquences importantes. La perte de l'immunité, la perte de la tribune politique, la scission de son mouvement et les graves attaques entre les ex-amis d'il y a une semaine encore, sont des éléments qui peuvent conduire à de nouveaux développements politiques et surtout judiciaires. N'oublions pas qu'en Italie, quand il s'agit d'élus, la Justice est aussi confrontée aux obstacles des autorisations à obtenir de l'assemblée concernée. Là, si les langues se délient, si des comptes (c'est le cas de le dire) se règlent, que n'apprendront pas les Italiens sur les scandales de ces 20 dernières années liés à la Mafia, aux grands chantiers, à l'évasion fiscale, aux offshores, aux mœurs, etc. Et là, certains noms reviennent souvent!  

    20 ans que l'Italie est asphyxiée, qu'un modèle pervers de comportement social, sociétal, politique est omniprésent. Enfin, l'espoir revient de voir s'achever cette période basée sur la propagande, le mensonge et la poudre aux yeux.

    Mais n'oublions pas nous Français, qu'avant l'Italie, Berlusconi a sévi aussi en France pas très loin d'un gouvernement socialiste. Là aussi peut-être un jour la Vérité?

     










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